Une opposition faible et divisée (article publié par le Times of Israel du 20 mai 2020)

Publié le par Philippe VELILLA

On a beaucoup parlé de la formation de ce curieux gouvernement dit d’urgence et d’union nationale, et encore plus de cet accord de coalition de quatorze pages qui traduit surtout la méfiance entre les deux grand partis désormais au pouvoir, le Likoud et Bleu-Blanc. Il n’empêche. La crise politique est finie et il y a désormais un gouvernement pour gouverner et un parlement pour contrôler et pour légiférer. En son sein, soixante-treize députés appartiennent à la majorité et quarante-sept à l’opposition. Celle-ci est profondément divisée. Il y a d’abord les grands perdants de l’élection du 2 mars, surtout la gauche qui n’a même plus les sept sièges obtenus lors de la consultation, puisqu’Orly Lévy-Abécassis et deux députés du Parti travailliste sur trois, Amir Peretz et Itsik Schmuli, sont entrés au gouvernement. Meretz ne se porte pas mieux avec seulement deux députés, Nitzan Horowitz et Tamar Zandberg, Yaïr Golan jusqu’à présent sans parti, ayant déclaré son intention d’en constituer un nouveau dans la tradition de la gauche sioniste. Du côté des perdants, on peut aussi inclure les deux partis de droite qui comptent seulement six députés pour Israel Beitenou et cinq pour Yemina depuis que le Rav Raphy Peretz a rejoint le gouvernement. Les véritables vainqueurs dans l’opposition sont la Liste unifiée, les partis arabes,  qui avec quinze députés obtiennent le meilleur score de leur histoire. Ce qui reste de l’ancien « parti des généraux », soit seize députés regroupés dans le groupe Telem-Yesh Atid, peut aussi être classé parmi les vainqueurs, puisque c’est son leader, Yaïr Lapid, qui désormais dirige l’opposition. Cela faisait longtemps que celle-ci était dépourvue d’un chef, et les premiers pas de Yaïr Lapid dans la fonction sont plutôt prometteurs. Mais sa tâche ne sera pas facile. Dès les premières réunions, Israel Beitenou a refusé de siéger aux côtés des partis arabes. Autre preuve de la division de l’opposition, lors de l’élection du président de la Knesset, deux candidats de celle-ci étaient concurrents : Karine Elharrar (Bleu-Blanc) et Ahmed Tibi (Liste unifiée). La première n’a pas obtenu toutes les voix qu’elle espérait, y compris au sein de son propre parti, où trois députés ont préféré voter pour Ahmed Tibi, tout comme les deux députés de Meretz. On savait que ce parti hésitait sur sa stratégie : maintien au sein de la gauche sioniste ou alliance avec les Arabes. Il semble avoir choisi. Ainsi, la gauche, ou ce qui en reste, devrait désormais compter un nouveau parti sioniste avec Yaïr Golan, et une alliance judéo-arabe dont les modalités restent à définir. De toute façon, cela ne suffira pas à modifier le paysage politique israélien dont le seul déséquilibre pourrait venir d’un conflit entre les deux grands partis de la coalition. Ce qui n’est pas exclu.

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